Un trésor de famille – Episode 8

Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Cela fait maintenant plusieurs heures qu’Hector et Mégane se sont enfoncés dans la forêt à la recherche de la fiancée d’Hector. Mégane commence à trouver le temps long.
– Tu es certain de savoir où elle est ?
– Oui, les esprits n’aiment pas changer de lieu, lorsqu’ils trouvent un endroit où ils se sentent bien, ils y restent, souvent pour l’éternité. Ah, je sens une odeur de murier, nous approchons.
Mégane renifle l’air, mais ne perçoit rien, et elle commence à se demander si elle a bien fait de suivre Hector dans cet univers inconnu. Est-ce que toute cette marche pourrait être une diversion, pour la détourner de sa mission ? Ou peut-être est-ce un piège ? Peut-être Hector est-il un double agent à la botte d’Archie et d’Adrien ? Oui, ça serait tout à fait possible… Mégane ralentit le pas, rattrapée par des pensées de plus en plus perturbantes. Quand soudainement, un aboiement puissant se fait entendre à quelques mètres d’eux. Mégane bondit en arrière et se réfugie derrière un arbre, le cœur à 1000 à l’heure. Contre toute attente, Hector se précipite dans la direction du molosse avec des miaulements stridents. Mégane est tétanisée. Elle attend, le souffle court, et se maudit d’avoir écouté son cœur trop enclin à croire l’histoire attendrissante que lui a servit Hector. Elle agrippe l’écorce du tronc qui lui sert de refuge pour se donner du courage et guette les bruits d’une bataille… qui ne vient pas. En réalité, la forêt est subitement très calme et un grand silence envahit l’espace. Les secondes paraissent des minutes, les minutes des heures… Que se passe t-il ? Mégane ose jeter un œil sur le chemin, et ce n’est qu’au bout d’un temps insondable qu’elle entend une voix qui l’appelle.

– Mégane ? Tu peux venir, il n’y a aucun danger. Nous avons retrouvé Athéna !
Mégane reste soupçonneuse, elle regarde maintenant dans la direction de la voix d’Hector et attend de le voir apparaître pour bouger. Quelqu’un d’autre pourrait avoir usurpé sa voix pour la tromper ? Mégane se ressaisit, elle est en plein délire parano ! Qui aurait cru qu’il soit aussi stressant d’être mort. De quoi elle a peur en fin de compte ? Quelque peu rassurée par cette idée, Mégane ose un pas hors de sa cachette, lorsque Hector réapparaît à quelques pas d’elle, accompagné par l’un des plus gros chiens que Mégane aie jamais rencontré.
– Mégane, on l’a retrouvé ! Je te présente Athéna, ma fiancée. Athéna, voici Mégane, la petite fille d’Abigaïl.
– Euh… Tu… Athéna…
– N’aie pas peur Mégane, Je sais que je peux paraitre impressionnante… J’imagine que tu ne t’attendais pas à trouver un Rottweiler.
– Euh, un quoi ?
– C’est la race de chien dans laquelle ce vieux fou d’Adrien m’a transformé, lorsque j’ai refusé qu’il utilise la plume pour ses activités démoniaques. Et pour s’assurer de nous séparer, il a transformé Hector en chat… Mais j’imagine qu’il t’a raconté ?
– Mais ça n’a pas marché. Athéna et moi, nous aimons au-delà de tout. Même si je dois avouer que j’ai mis un peu de temps à m’y habituer. Les chiens, les chats, au début, j’ai cru que c’était dans mes gènes, et que je ne pourrais jamais dépasser mes réactions instinctives à chaque fois que je la voyais. Et puis, je suis parvenu à dépasser ces a priori pour me reconnecter à la force de notre amour. Vivre ensemble, c’est tout ce qui compte, mais pour cela, il nous faut partir du monde des esprits.
– Ça alors, Hector, tu me surprends. Je n’aurais jamais imaginé…
– Que je sois un humain, comme toi, transformé en chat ? Comment l’aurais-tu deviné ?
– Mais que faisais-tu chez Grand-mère ?
– La bonne nouvelle en étant transformé en chat, c’est que j’ai pu faire des aller-retour entre le pays des esprits et celui des vivants pour trouver une solution. Mon enquête a fini par me mener à ta Grand-mère, et puis à toi. Mégane, si ce que j’ai découvert est exact, tu es la seule à pouvoir nous délivrer de l’influence néfaste des jumeaux. Nous, et pas mal d’autres esprits retenus prisonniers ici.
– À ce propos, ne perdons pas plus de temps. Cette petite a besoin de récupérer la Plume au plus vite. À l’heure qu’il est, il est certain qu’Adrien est déjà au courant de votre arrivée, mais le moins de temps nous lui laissons pour se préparer, le plus nous aurons de chance de réussir !
– Athéna a raison. Mettons-nous en route, je te raconterai ce que je sais sur le chemin…

A la semaine prochaine !

Un trésor de famille – Episode 7

Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Mégane flotte, à moins qu’elle ne vole? Elle est comme propulsée dans les airs à vive allure et sa trajectoire semble toute tracée. Elle est attirée comme un aimant vers une destination inconnue. Et, de là où elle se trouve, Archibald n’est déjà plus qu’une minuscule tache de couleur. Elle est tombée dans le piège qu’il lui a tendu avec son chocolat chaud. Mégane aurait dû se méfier, mais étrangement, elle ne s’inquiète pas trop. Elle a la certitude d’être là où elle doit être. Tout cela peut paraitre très étrange, mais à la minute où elle a appris l’existence de cette plume, elle a sut qu’il était très important pour elle de la retrouver. Archibald l’a peut-être manipulé, en mélangeant une potion à son chocolat, mais en réalité, elle aurait été partante de toute façon. Trop occupée par ses pensées, Mégane ne s’aperçoit pas qu’elle a fermé les yeux, et quand elle décide de les rouvrir, elle se découvre, avec surprise, assise dans le fauteuil face à Archibald, comme si rien ne s’était jamais passé.
– Il semblerait que votre chocolat ne soit pas très efficace !
Archibald parait pensif, il la regarde sans réagir, puis finit par pousser un grand soupir.
– Enfin bon, les dés en sont jetés. Tu sais où me trouver.
Puis il se lève et disparaît par la porte par laquelle il était arrivé avec son plateau et les tasses de chocolat. Peut-être la cuisine ?

Mégane se lève du fauteuil. Enfin, elle pense à se lever du fauteuil, et elle se retrouve, en un instant, debout face à ce mur de livres, que constitue la gigantesque bibliothèque d’Archibald. Elle se sent un peu désorientée, car elle n’a pas la sensation d’avoir marché jusque là. Elle regarde ses pieds et sent un léger courant d’air lui chatouiller les mollets.
– Hector, c’est toi ?
– Oui Mégane, je suis avec toi. Nous sommes dans le monde des esprits.
– Mais qu’est-ce que tu racontes ? Tu vois bien que nous sommes toujours dans le Salon d’Archie.
– Tu as raison, et pourtant, nous sommes aussi dans le monde des esprits. Regarde dans le fauteuil d’où tu viens ?
Mégane se retourne pour se découvrir elle-même, affalée dans le fauteuil, inconsciente, avec Hector sur les genoux.
– Mais qu…
– Je sais que je ne t’apporte pas de bonnes nouvelles depuis quelque temps, mais… nous sommes morts.
– QUOI??!
– Ne panique pas! Ça me fait toujours flipper les gens qui paniquent… Archie a un peu enjolivé la situation. En réalité, le monde des esprits n’est accessible que par les morts, c’est la condition unique et incontournable pour être ici.
– Tu veux dire qu’il m’a volontairement empoisonnée?! Mais pourquoi aurait-il fait cela ? C’est horrible !
– Par cupidité, par rivalité, par bêtise, que sais-je ? Les hommes font tout un tas de choses horribles sans raison valable. Archibald est obnubilé par cette plume depuis tellement d’années. Mais ne t’inquiète pas, je vais pouvoir te guider.
– Tu es déjà venu ici ?
– Bien sûr, plus d’une fois. Tu sais que les chats ont neuf vies ? Tiens regarde, le passage est dégagé.
Mégane se retourne face à la bibliothèque, et là où, une minute plus tôt, se tenaient des rangées de livres anciens, se trouve maintenant l’embrasure d’une porte grande ouverte. Hector entre le premier, et l’invite à le suivre. Sans transition, ils se retrouvent tout deux dans un magnifique jardin à l’anglaise, avec un joli gazon vert, coupé très ras, et des bosquets de fleurs multicolores. Mégane reste subjuguée un moment par ce nouveau décor.

– Bon, et bien il nous faut trouver cette plume n’est-ce pas ? Voyons cette carte qu’Archie m’a donnée.
– Laisse tomber la carte, Mégane, il nous faut d’abord retrouver ma dulcinée.
– Ta quoi ?
– Mon amoureuse, ma fiancée, l’amour de ma vie… Dieu que ton vocabulaire est limité !
– Ne sois pas désagréable Hector. Je suis contente pour toi de te savoir amoureux, mais je ne vois pas le rapport avec ma mission de retrouver la plume. Je crois que nos chemins se séparent ici. Et étant donné ton caractère, tu ne vas pas me manquer !
– Pardonne-moi si j’ai été brusque. Je suis à cran. Cela fait des années que j’attends cette opportunité. Et d’ailleurs, sache que ma douce Athena est la seule à pouvoir approcher la plume sans l’autorisation de son propriétaire actuel. Elle est donc la seule à pouvoir t’aider.
– Explique-toi, je ne comprends rien à ce que tu racontes.
– La plume appartient aujourd’hui à Adrien, le frère jumeau d’Archie. Il est mort en emportant la plume avec lui. C’est un vieil esprit, revêche et malveillant, qui s’en sert pour écrire des incantations maléfiques. En suivant la carte, tu auras tout le loisir de faire sa connaissance, et je te souhaite bien du plaisir ! Au mieux, il te gardera pour se distraire, au pire, tu finiras, comme ma tendre Athena, transformée en « je ne sais quel animal » et condamnée à errer dans les couloirs du château pour l’éternité.
– Qui me dit que ce que tu racontes est vrai ? Archibald n’a pas parlé d’un frère, encore moins d’un danger particulier.
– Archibald ne t’a pas, non plus, prévenu que tu allais mourir !
– …
L’espace d’un instant, Mégane écoute cette petite voix en elle, qui, depuis le début de l’aventure, a toujours été de bon conseil.
– D’accord Hector. Finit-elle par répondre. Qu’est-ce que tu proposes ?

La suite, mercredi prochain…

Un trésor de famille – Episode 6


Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Mégane suit le vieil Archibald dans l’escalier de pierre. Elle est presque obligée de se coller à lui pour rester dans la lumière de son chandelier. Sans ses amis à ses côtés, Mégane se sent particulièrement vulnérable et elle est de plus en plus inquiète. Chaque recoin pourrait abriter des dangers inconnus et il lui semble percevoir des chuchotements, des murmures, qui se taisent lorsqu’elle s’arrête pour tenter de les écouter plus attentivement.
– Ne traîne pas, petite, il est facile de se perdre dans les dédales de la Tour.
Après plusieurs étages, Archie ralentit enfin, pousse une lourde porte en bois et l’invite à entrer. L’accueil de la pièce lui apparaît d’emblée beaucoup plus chaleureux que tous les endroits qu’elle a pu traverser depuis son arrivée. Un gigantesque feu de cheminée crépite dans le centre de la pièce, de grandes draperies de velours rouges réchauffent agréablement l’espace et une bibliothèque monumentale recouvre les murs, du sol au plafond, sur une grande partie de la pièce. Le vieil Archibald semble satisfait du silence impressionné de son invitée.
– Tu apprécies le confort de mon humble demeure ?
Mégane ne répond rien, elle s’approche des livres les plus proches pour en déchiffrer les tranches. « Le grand livre de la Magie », « Histoires lugubres et autres contes », chaque titre lui révèle un univers mystérieux et fascinant. Mégane ne parvient plus à détacher ses yeux de tous ces livres magnifiques dont la plupart ont des couvertures précieuses. Archibald lui propose aimablement un chocolat et s’absente un instant de la pièce, le temps de sa préparation.

En l’attendant, Mégane poursuit son exploration, et s’apprête à se saisir de « l’Encyclopédie des Créatures magiques » lorsqu’un objet inconnu lui tombe douloureusement sur la tête. Elle le ramasse à la hâte et découvre avec stupeur le roman disparu de la bibliothèque de sa Grand-mère.
– L’île au trésor de Stevenson, c’est bien l’ouvrage que tu cherchais ?
Mégane lève la tête vers Hector qui se promène avec agilité sur les étagères pourtant encombrées de livres et de menus objets.
– Je ne vois pas en quoi cela te concerne !
– Prends-le avant qu’Archie ne revienne. Il ne t’autorisera jamais à le récupérer.
Mégane n’a pas le temps de répliquer, car Archibald revient dans la pièce, les bras chargés d’un plateau dégageant une merveilleuse odeur de chocolat. Sans réfléchir, elle enfouit le petit livre dans sa poche de sweat-shirt.

– Mégane, assieds toi. Dit-il en lui désignant un fauteuil face à lui.
Elle s’exécute, nerveuse à nouveau.
– Je ne vais pas y aller par quatre-chemins. Toi et tes amis, vous ne pouvez pas retourner chez ta Grand-mère sans mon aide, et moi, j’ai besoin de toi pour me ramener un objet qui m’appartient.
– Un objet ? Quel objet ?
– C’est une plume, une plume pour écrire. Elle était le clou de ma collection, et on me l’a volé. Je veux absolument la récupérer. Tiens, je t’ai préparé une carte pour te guider directement à l’emplacement ou elle a été mise en réserve.
– Si vous savez où elle est, pourquoi n’allez-vous pas la chercher vous-même ?
– Et bien, pour des raisons qui seraient trop compliquées à t’expliquer, cette plume se trouve maintenant dans un autre monde, dans lequel je ne suis pas le bienvenu.
– Un autre monde que celui-ci ? Mon monde ?
– Non, un monde principalement peuplé d’esprits. Ce sont eux, qui gardent ma précieuse plume. Et je sais qu’une âme pure, comme la tienne, n’aura aucun mal à se faufiler parmi eux, pour la retrouver.
– Vous voulez que j’aille dans le monde des esprits ? Mais qu’est-ce qui vous dit que je vais réussir ? Et puis comment je vais accéder à ce monde ?
– Je t’avoue que je n’ai aucune garantie, mais tu es ma seule chance d’y parvenir, comme je suis ta seule chance de retour chez toi. CA se tente !
– Mais je…. Ahhhh… Je ne me sens pas très bien.
– Oui, c’est normal, tu es déjà en partance pour le monde des esprits. J’ai versé l’élixir nécessaire dans ton chocolat, des fois que tu refuses de l’avaler de ton plein gré. C’est le seul moyen d’accéder à ce monde, mais son effet est limité dans le temps et ne peut être utilisé qu’une fois. Presse-toi, sinon toi et tes amis resterez dans mes cachots pour le restant de vos jours.
– Arghhhh…. J’ai si mal au ventre ! J’ai chaud… Je…
Mégane est pliée de douleur, elle a la tête qui tourne, sa respiration s’accélère, elle a l’impression de devenir complètement folle.
– Hector, NON !!
Alors que la pauvre Mégane s’effondre dans son fauteuil, Hector surprend son Maitre en atterrissant avec souplesse sur la table basse, pour lécher le restant de chocolat, laissé par Mégane.
– Hector, mais qu’est-ce que tu fais ? Tu sais que pour toi l’effet sera irréversible !
Mais Hector continue de laper le fond de la tasse, puis il se traîne péniblement sur les genoux de Mégane, avant de s’évanouir à son tour.

La suite, la semaine prochaine…

UPDATE: la suite ICI.