Un trésor de famille – Episode 7

Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Mégane flotte, à moins qu’elle ne vole? Elle est comme propulsée dans les airs à vive allure et sa trajectoire semble toute tracée. Elle est attirée comme un aimant vers une destination inconnue. Et, de là où elle se trouve, Archibald n’est déjà plus qu’une minuscule tache de couleur. Elle est tombée dans le piège qu’il lui a tendu avec son chocolat chaud. Mégane aurait dû se méfier, mais étrangement, elle ne s’inquiète pas trop. Elle a la certitude d’être là où elle doit être. Tout cela peut paraitre très étrange, mais à la minute où elle a appris l’existence de cette plume, elle a sut qu’il était très important pour elle de la retrouver. Archibald l’a peut-être manipulé, en mélangeant une potion à son chocolat, mais en réalité, elle aurait été partante de toute façon. Trop occupée par ses pensées, Mégane ne s’aperçoit pas qu’elle a fermé les yeux, et quand elle décide de les rouvrir, elle se découvre, avec surprise, assise dans le fauteuil face à Archibald, comme si rien ne s’était jamais passé.
– Il semblerait que votre chocolat ne soit pas très efficace !
Archibald parait pensif, il la regarde sans réagir, puis finit par pousser un grand soupir.
– Enfin bon, les dés en sont jetés. Tu sais où me trouver.
Puis il se lève et disparaît par la porte par laquelle il était arrivé avec son plateau et les tasses de chocolat. Peut-être la cuisine ?

Mégane se lève du fauteuil. Enfin, elle pense à se lever du fauteuil, et elle se retrouve, en un instant, debout face à ce mur de livres, que constitue la gigantesque bibliothèque d’Archibald. Elle se sent un peu désorientée, car elle n’a pas la sensation d’avoir marché jusque là. Elle regarde ses pieds et sent un léger courant d’air lui chatouiller les mollets.
– Hector, c’est toi ?
– Oui Mégane, je suis avec toi. Nous sommes dans le monde des esprits.
– Mais qu’est-ce que tu racontes ? Tu vois bien que nous sommes toujours dans le Salon d’Archie.
– Tu as raison, et pourtant, nous sommes aussi dans le monde des esprits. Regarde dans le fauteuil d’où tu viens ?
Mégane se retourne pour se découvrir elle-même, affalée dans le fauteuil, inconsciente, avec Hector sur les genoux.
– Mais qu…
– Je sais que je ne t’apporte pas de bonnes nouvelles depuis quelque temps, mais… nous sommes morts.
– QUOI??!
– Ne panique pas! Ça me fait toujours flipper les gens qui paniquent… Archie a un peu enjolivé la situation. En réalité, le monde des esprits n’est accessible que par les morts, c’est la condition unique et incontournable pour être ici.
– Tu veux dire qu’il m’a volontairement empoisonnée?! Mais pourquoi aurait-il fait cela ? C’est horrible !
– Par cupidité, par rivalité, par bêtise, que sais-je ? Les hommes font tout un tas de choses horribles sans raison valable. Archibald est obnubilé par cette plume depuis tellement d’années. Mais ne t’inquiète pas, je vais pouvoir te guider.
– Tu es déjà venu ici ?
– Bien sûr, plus d’une fois. Tu sais que les chats ont neuf vies ? Tiens regarde, le passage est dégagé.
Mégane se retourne face à la bibliothèque, et là où, une minute plus tôt, se tenaient des rangées de livres anciens, se trouve maintenant l’embrasure d’une porte grande ouverte. Hector entre le premier, et l’invite à le suivre. Sans transition, ils se retrouvent tout deux dans un magnifique jardin à l’anglaise, avec un joli gazon vert, coupé très ras, et des bosquets de fleurs multicolores. Mégane reste subjuguée un moment par ce nouveau décor.

– Bon, et bien il nous faut trouver cette plume n’est-ce pas ? Voyons cette carte qu’Archie m’a donnée.
– Laisse tomber la carte, Mégane, il nous faut d’abord retrouver ma dulcinée.
– Ta quoi ?
– Mon amoureuse, ma fiancée, l’amour de ma vie… Dieu que ton vocabulaire est limité !
– Ne sois pas désagréable Hector. Je suis contente pour toi de te savoir amoureux, mais je ne vois pas le rapport avec ma mission de retrouver la plume. Je crois que nos chemins se séparent ici. Et étant donné ton caractère, tu ne vas pas me manquer !
– Pardonne-moi si j’ai été brusque. Je suis à cran. Cela fait des années que j’attends cette opportunité. Et d’ailleurs, sache que ma douce Athena est la seule à pouvoir approcher la plume sans l’autorisation de son propriétaire actuel. Elle est donc la seule à pouvoir t’aider.
– Explique-toi, je ne comprends rien à ce que tu racontes.
– La plume appartient aujourd’hui à Adrien, le frère jumeau d’Archie. Il est mort en emportant la plume avec lui. C’est un vieil esprit, revêche et malveillant, qui s’en sert pour écrire des incantations maléfiques. En suivant la carte, tu auras tout le loisir de faire sa connaissance, et je te souhaite bien du plaisir ! Au mieux, il te gardera pour se distraire, au pire, tu finiras, comme ma tendre Athena, transformée en « je ne sais quel animal » et condamnée à errer dans les couloirs du château pour l’éternité.
– Qui me dit que ce que tu racontes est vrai ? Archibald n’a pas parlé d’un frère, encore moins d’un danger particulier.
– Archibald ne t’a pas, non plus, prévenu que tu allais mourir !
– …
L’espace d’un instant, Mégane écoute cette petite voix en elle, qui, depuis le début de l’aventure, a toujours été de bon conseil.
– D’accord Hector. Finit-elle par répondre. Qu’est-ce que tu proposes ?

La suite, mercredi prochain…

Un trésor de famille – Episode 6


Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Mégane suit le vieil Archibald dans l’escalier de pierre. Elle est presque obligée de se coller à lui pour rester dans la lumière de son chandelier. Sans ses amis à ses côtés, Mégane se sent particulièrement vulnérable et elle est de plus en plus inquiète. Chaque recoin pourrait abriter des dangers inconnus et il lui semble percevoir des chuchotements, des murmures, qui se taisent lorsqu’elle s’arrête pour tenter de les écouter plus attentivement.
– Ne traîne pas, petite, il est facile de se perdre dans les dédales de la Tour.
Après plusieurs étages, Archie ralentit enfin, pousse une lourde porte en bois et l’invite à entrer. L’accueil de la pièce lui apparaît d’emblée beaucoup plus chaleureux que tous les endroits qu’elle a pu traverser depuis son arrivée. Un gigantesque feu de cheminée crépite dans le centre de la pièce, de grandes draperies de velours rouges réchauffent agréablement l’espace et une bibliothèque monumentale recouvre les murs, du sol au plafond, sur une grande partie de la pièce. Le vieil Archibald semble satisfait du silence impressionné de son invitée.
– Tu apprécies le confort de mon humble demeure ?
Mégane ne répond rien, elle s’approche des livres les plus proches pour en déchiffrer les tranches. « Le grand livre de la Magie », « Histoires lugubres et autres contes », chaque titre lui révèle un univers mystérieux et fascinant. Mégane ne parvient plus à détacher ses yeux de tous ces livres magnifiques dont la plupart ont des couvertures précieuses. Archibald lui propose aimablement un chocolat et s’absente un instant de la pièce, le temps de sa préparation.

En l’attendant, Mégane poursuit son exploration, et s’apprête à se saisir de « l’Encyclopédie des Créatures magiques » lorsqu’un objet inconnu lui tombe douloureusement sur la tête. Elle le ramasse à la hâte et découvre avec stupeur le roman disparu de la bibliothèque de sa Grand-mère.
– L’île au trésor de Stevenson, c’est bien l’ouvrage que tu cherchais ?
Mégane lève la tête vers Hector qui se promène avec agilité sur les étagères pourtant encombrées de livres et de menus objets.
– Je ne vois pas en quoi cela te concerne !
– Prends-le avant qu’Archie ne revienne. Il ne t’autorisera jamais à le récupérer.
Mégane n’a pas le temps de répliquer, car Archibald revient dans la pièce, les bras chargés d’un plateau dégageant une merveilleuse odeur de chocolat. Sans réfléchir, elle enfouit le petit livre dans sa poche de sweat-shirt.

– Mégane, assieds toi. Dit-il en lui désignant un fauteuil face à lui.
Elle s’exécute, nerveuse à nouveau.
– Je ne vais pas y aller par quatre-chemins. Toi et tes amis, vous ne pouvez pas retourner chez ta Grand-mère sans mon aide, et moi, j’ai besoin de toi pour me ramener un objet qui m’appartient.
– Un objet ? Quel objet ?
– C’est une plume, une plume pour écrire. Elle était le clou de ma collection, et on me l’a volé. Je veux absolument la récupérer. Tiens, je t’ai préparé une carte pour te guider directement à l’emplacement ou elle a été mise en réserve.
– Si vous savez où elle est, pourquoi n’allez-vous pas la chercher vous-même ?
– Et bien, pour des raisons qui seraient trop compliquées à t’expliquer, cette plume se trouve maintenant dans un autre monde, dans lequel je ne suis pas le bienvenu.
– Un autre monde que celui-ci ? Mon monde ?
– Non, un monde principalement peuplé d’esprits. Ce sont eux, qui gardent ma précieuse plume. Et je sais qu’une âme pure, comme la tienne, n’aura aucun mal à se faufiler parmi eux, pour la retrouver.
– Vous voulez que j’aille dans le monde des esprits ? Mais qu’est-ce qui vous dit que je vais réussir ? Et puis comment je vais accéder à ce monde ?
– Je t’avoue que je n’ai aucune garantie, mais tu es ma seule chance d’y parvenir, comme je suis ta seule chance de retour chez toi. CA se tente !
– Mais je…. Ahhhh… Je ne me sens pas très bien.
– Oui, c’est normal, tu es déjà en partance pour le monde des esprits. J’ai versé l’élixir nécessaire dans ton chocolat, des fois que tu refuses de l’avaler de ton plein gré. C’est le seul moyen d’accéder à ce monde, mais son effet est limité dans le temps et ne peut être utilisé qu’une fois. Presse-toi, sinon toi et tes amis resterez dans mes cachots pour le restant de vos jours.
– Arghhhh…. J’ai si mal au ventre ! J’ai chaud… Je…
Mégane est pliée de douleur, elle a la tête qui tourne, sa respiration s’accélère, elle a l’impression de devenir complètement folle.
– Hector, NON !!
Alors que la pauvre Mégane s’effondre dans son fauteuil, Hector surprend son Maitre en atterrissant avec souplesse sur la table basse, pour lécher le restant de chocolat, laissé par Mégane.
– Hector, mais qu’est-ce que tu fais ? Tu sais que pour toi l’effet sera irréversible !
Mais Hector continue de laper le fond de la tasse, puis il se traîne péniblement sur les genoux de Mégane, avant de s’évanouir à son tour.

La suite, la semaine prochaine…

UPDATE: la suite ICI.

Un trésor de famille – Episode 5

Pour ceux qui auraient loupé le début de l’histoire.

Les trois acolytes se retrouvent à nouveau devant la porte de l’armoire, mais celle-ci est complètement inerte. Mégane et Pélops sont perplexes.
– Tu es sûr que l’armoire « fonctionne »?
– Il n’y a aucun doute là dessus. Si tu sais où est la clé, bien sûr. Sans elle, nous ne pouvons rien faire.
Mégane sort discrètement la clé de sa cachette et la brandit devant Hector en s’approchant pour l’introduire dans la serrure.
– Attends. Cette clé est TRÈS importante, car sans elle, nous ne pourrons pas revenir dans ce monde. Tu as un moyen de t’assurer de ne pas la perdre ?
Mégane réfléchit et s’absente un instant dans le salon. Pélopidas et Hector l’entendent déplacer des objets et elle revient quelques minutes plus tard avec un grand ruban de satin, trouvé dans la boite à couture de sa Grand-mère.
– Voilà, je suis prête.
Elle s’avance vers eux, la clé maintenant accrochée en pendentif autour de son cou, grâce au joli ruban.
– Bien joué petite, maintenant préparez vous à une belle envolée !
Suivant les indications d’Hector, Mégane s’approche de l’armoire et tourne la clé.

La lumière aveuglante réapparaît aussitôt, l’armoire entière semble prendre vie, et Mégane a juste le temps de sortir la clé de la serrure qu’elle est aspirée, avec Pélops et Hector, à l’intérieur. S’en suit une chute vertigineuse, dans un espace qui ne semble n’avoir aucune limite. Les trois amis sont secoués dans tous les sens, et traversent successivement des strates de couleurs éblouissantes dans laquelle la densité de l’air semble différente. Des sensations étranges la parcourent à chaque changement de couleur. Mégane en a le souffle coupé et se sent complètement désorientée lorsque son corps heurte violemment le sol dur d’une pièce plongée dans le noir. Quelque peu sonnée, elle met un certain temps a retrouver ses esprits. Et ce n’est qu’au bout d’une bonne minute, qu’elle parvient à se relever en tâtonnant.
– Pélops ? Hector ? Vous êtes là?
– Je suis là répond Pélopidas d’une voix lointaine.
– Mégane ?
– Sophie !! Où êtes-vous tous les deux, je vous entends, mais je ne vous vois pas?
– Je suis dans une sorte de chambre, pas trop loin de vous, j’imagine. Ah que je suis contente de vous entendre ! Vous en avez mis du temps à arriver. J’ai cru que jamais vous ne me retrouveriez.
– Oh Sophie, j’ai eu tellement peur pour toi !
Les yeux de Mégane se sont maintenant suffisamment acclimatés à l’obscurité pour apercevoir la silhouette agile d’Hector se faufiler à travers des barreaux et détaler vers les marches d’un grand escalier en colimaçon. Manifestement, Pélops l’a également aperçu :
– Quel traître. Je savais que l’on ne pouvait pas faire confiance à ce chat de malheur !
Mégane est désemparée, elle ne répond rien, elle regarde autour d’elle et distingue maintenant une sorte de cachot moyenâgeux. Les murs et le sol sont recouverts d’une pierre froide et luisante. Et un lit à baldaquin, seul meuble à l’horizon, trône au milieu de la pièce. D’un coté, une fenêtre très étroite laisse rentrer un faible rayon de lumière, tandis que de l’autre coté, une grille en fer forgé relie le sol au plafond.
– Nous sommes enfermés. En prison. Ah Hector nous a bien eus !
– J’avoue que je ne m’attendais pas à ça…
Mais leur conversation est rapidement interrompue, car des pas inquiétants se font entendre, provenant de l’escalier. Les trois amis se taisent, tous leurs sens aux aguets. Leurs yeux se tournent avec appréhension vers les marches qui se dessinent dans la pénombre.

Au bout de quelques minutes, une silhouette noueuse se dessine dans la lumière d’un chandelier, porté à bout de bras.
– Tiens, tiens, tiens, mais oui, ce sale chat ne m’a pas menti, c’est bien une petite fille que je vois là.
– Qui êtes-vous ? Libérez-nous, nous sommes arrivés ici par erreur ! Tente vaillamment Mégane pour conjurer sa peur.
– Une erreur ? Je ne crois pas, non. J’attends votre venue depuis longtemps. L’arrivée de la poupée était un bon présage, je me suis doutée que les choses étaient en train de tourner en ma faveur. Tu es la petite fille de la vieille Hazel, j’imagine.
– Je ne comprends pas, de quoi parlez vous ?
– Tu es la petite fille de la vieille Hazel, j’imagine. Comme t’appelles-tu ?
– Je suis Mégane. Et vous ?
– Je m’appelle Archibald, mais tu peux m’appeller Archie. J’imagine que si tu es ici, c’est que tu as entendu parlé du Trésor?
– Je ne suis pas sure…
– Ahahah, inutile de me mentir, grande fille. Allez, Viens maintenant, nous n’avons pas de temps à perdre. Si tu veux un jour revoir ta Grand-mère et le monde dans lequel tu vis, tu n’as d’autre choix que de me suivre. J’ai une proposition à te faire, une opportunité que tu n’auras qu’une fois dans ta vie !

UPDATE: La suite, c’est ici !