Soirées pourries et matins radieux

Quand j’étais salariée, j’entendais souvent parlé de la « sécurité de l’emploi » et pendant longtemps, cette menace, déguisée en amie, m’a gardé captive du milieu de l’entreprise. Mais même si intellectuellement, je comprenais et profitais de cette sécurité, n’ayant jamais rien connu d’autre que le salariat, la perception de sa valeur restait abstraite. Et à partir du moment ou les sirènes de l’entrepreneuriat ont commencé à chantonner doucement à mes oreilles, elle n’a plus représenté un véritable obstacle au grand saut dans l’inconnu.

«  C’est souvent la perte des choses qui en enseigne la valeur. »

Arthur Schopenhauer

Vous le savez, je suis à mon compte depuis maintenant un an, et je peux aujourd’hui vous en parler plus « concrètement » car le fantôme de cette sécurité perdue, a pris l’habitude de me rendre une petite visite, le soir, lorsque je suis tranquillement dans mon lit, aux portes du sommeil.

Est-ce que j’avance dans la bonne direction ? Est-ce que je vais quelque part ? Est-ce que je suis sure de là où je veux aller ? Est-ce que je devrais écouter les conseils de telle personne ? Est-ce que j’ai raison de suivre mon intuition ?

La nuit est devenu le royaume de l’incertitude et des doutes. Toutes ces questions, sont celles que se posent la plupart des entrepreneurs de la Terre. Certainement celles que se posait le PDG de la boite dans laquelle je travaillais. À l’époque, je ne me rendais pas compte que mon contrat de travail avait reparti les taches entre nous : en gros, lui se faisait les cheveux blancs pour prendre des décisions, et moi, j’exécutais le fruit de ses angoisses. Une répartition plutôt à mon avantage, maintenant que j’y réfléchis à tête reposée, car ce sont ces questions qui me tiennent éveillée jusque tard dans la nuit. Et c’est avec une certaine nostalgie, que je me souviens de mes soirées, en tant que salariée, où je rentrais chez moi, fourbue de ma journée, avec comme seule préoccupation, celle de me « changer les idées ». Je me couchais, et je m’endormais confiante, parfois un peu blasée, et je ne me posais même pas la question de mon avenir, car j’avais le sentiment qu’il était déjà tracé. Ces soirées sans histoire n’avaient rien d’extraordinaire, mais dans les affres de certaines nuits blanches, il m’est sincèrement arrivé de les regretter. Mais tel un bon petit marin, perdu par le chant des sirènes, je brave la tempête. J’apprends à maintenir mon bateau à flots, grace à des litres de fleurs de Bach, des heures de méditation, de yoga, et surtout grâce à la foi, que tout cela n’est qu’un moment de panique, et que tout ira mieux, demain.

Et effectivement, le lendemain, la météo a changé et je suis réveillée par un soleil radieux. J’ouvre les yeux sur le pont de mon bateau avec une seule idée en tête : celle de me remettre à la barre et de voguer vers mes rêves. Car aux soirs de désespoirs de ma nouvelle vie d’entrepreneur, succèdent des matins qui chantent. Je ne me réveille plus avec cette envie de meurtre, dirigée contre tout objet strident, ou toute personne vivante, qui aurait la cruauté de vouloir me faire sortir de mon lit. À la lumière du matin, mes doutes se sont mués en espoir, en opportunités, en enthousiasme. Je sors de mon lit d’un pas léger. Je ne sais pas ce que cette journée va m’apporter, mais c’est justement ce qui la rend excitante. Il n’y a plus de TO DO list, faite par quelqu’un d’autre, en même temps, il n’y a plus d’excuse pour ne pas déployer mon plein potentiel. La journée qui s’annonce ne dépend plus que de moi et tout à coup, toutes ces incertitudes constituent la plus dynamisante des drogues ! Un tel revirement, avouez que c’est surprenant. Qu’est-ce qui m’est arrivé ? Suis-je en train de développer des troubles du comportement ? Non, je deviens juste entrepreneur. Je découvre la vie, avec ses hauts (très hauts !), et ses bas (très bas!) et je ne me suis jamais sentie aussi vivante que dans ces roulis inédits.

Est-ce que tout cela va aboutir sur un métier pérenne ? Est-ce que je vais parvenir à concrétiser mes rêves ?

Je ne le sais toujours pas. Mais je contribue, chaque jour, activement, à leur concrétisation. Et je me laisse bercer par cette sagesse populaire, ce slogan publicitaire plus éclairé et profond que bien des paraboles mystiques :

« 100% des gagnants ont tenté leur chance »

La française des jeux

Réconcilier personnel et professionnel

J’ai passé presque vingt ans en entreprise. Et pendant de longues années, je croyais avoir trouvé un bon équilibre entre mon travail et ma vie privée. Je dois reconnaître, qu’à l’époque, je ne me connaissais pas beaucoup, je n’avais aucune idée de ce que je voulais de la vie, et encore moins de la façon dont je souhaitais la faire évoluer. L’entreprise m’apportait une réponse toute faite à ces questions que je n’osais pas me poser. Le statut de salarié m’a offert ce cadre rassurant dans lequel tout était prédéfini. J’avais un rôle attribué, un code de conduite clairement établi, et des perspectives d’évolution, qui me permettaient de me sentir en sécurité. Pendant plus de dix ans, j’y ai trouvé un équilibre, dont je ne me doutais pas un instant qu’il était précaire.

En 2009, la vie m’obligeant à repartir de 0 dans mon parcours personnel, cet équilibre a été brutalement rompu. Car même si, à l’époque, j’ai tout fait pour que mes problèmes personnels n’interfèrent pas avec ma « bulle professionnelle », je me suis rendu compte à quel point la frontière entre les deux était illusoire. On nous répète qu’il est sain de ne pas mélanger le personnel et le professionnel, mais cette année d’épreuves m’a montré que cette injonction était non seulement culpabilisante, mais surtout déshumanisante. Car, qu’on le veuille ou non, vivre consiste, justement, à être affecté par les événements qui nous arrivent. Que ces événements prennent leur origine dans le cadre professionnel ou personnel, ne change rien à la force des émotions qu’ils génèrent. Et nous demander d’ériger un mur entre les deux, c’est nous demander de renoncer à notre humanité. Prendre conscience de cette réalité et l’accepter, a été pour moi le début du long chemin qui m’amène aujourd’hui à l’entrepreneuriat. Car quel plus beau projet que de concilier sa personnalité à son travail ?

« Choisissez un travail que vous aimez et vous n’aurez pas à travailler un seul jour de votre vie. »

Confucius

En me retrouvant dans l’obligation de me réinventer dans ma vie personnelle, étonnamment, le cadre de ma vie professionnelle ne m’est plus apparut aussi épanouissant. Je me suis sentie comme ces adolescents qui prennent dix centimètres en un été. A la Rentrée, rien de ce qu’ils connaissaient n’est véritablement le même, car prendre dix centimètres brutalement, change complètement de perspective. Et c’est ce qu’il s’est passé pour moi. Certaines des situations qui auparavant m’étaient habituelles, sont devenues étrangement inconfortables. Les règles de fonctionnement que je trouvais si rassurantes, m’ont progressivement paru étouffantes. Les missions que l’on me donnait se sont vidées de leur sens. Ce processus ne s’est pas fait en un jour, mais il n’en a pas moins été irréversible. Et, année après année, une question simple est apparue dans mon esprit, et ne m’a plus quitté :

« Comment serait ma vie, si j’étais mon propre patron ? »

J’ai mis longtemps avant de tenter concrètement d’y apporter une réponse, car j’avais désormais conscience que cela engageait ma vie au sens large. Aujourd’hui, cela fait deux ans que je me suis formée au Coaching, et environ un an que j’ai quitté mon emploi pour me lancer dans l’Aventure, et je commence seulement à saisir l’ampleur du bouleversement identitaire que représente le fait de passer du salariat à l’entrepreneuriat.

Sans ligne de conduite édictée par une entreprise, l’entrepreneur est seul face à lui-même pour décider de sa posture, de la direction de son business, de sa relation client. Non seulement il n’existe plus de frontières claires entre personnel et professionnel, mais le personnel se retrouve au coeur du processus visant à créer un business qui ait du sens pour soi. Le seul outil de travail, qui ait vraiment de la valeur pour un travailleur indépendant, c’est lui-même. Il devient alors fondamental de se connaître, et l’expérience me montre, chaque jour, combien cela demande de prendre son temps. Et je dois reconnaitre que, pour quelqu’un d’habitué à être productif comme on l’apprend en entreprise, ce rythme est très frustrant. Depuis un an, j’ai expérimenté énormément de choses, et j’ai eu le sentiment de me découvrir sur bien des aspects. Savoir composer avec ses qualités, ses limites, ses convictions, ses doutes, c’est ce qui construit mon activité au quotidien. Le coeur du métier que je crée sur mesure, se révèle un peu chaque jour. La connaissance de soi, l’expérimentation, la réflexion, la digestion, constituent autant de facettes d’un processus organique lent, mais fascinant. Je découvre, de l’intérieur, comment la chenille devient papillon, et ce n’est pas sans une bonne dose de stress ! 😉 À ce stade, je sens bien qu’il est encore compliqué pour moi de présenter mon activité de manière simple. Et à la question :

« Qu’est ce que vous faites dans la vie ? »

J’aurais envie de répondre :

« Je fais de mon mieux. »

Et vous ? Comment vous positionnez vous par rapport à votre travail ? Est-ce que vous considérez ce que vous faites comme un part de votre identité ?

Journal d’écriture – Mai 2020

Mois : #2
Nombre de jours ou j’ai travaillé à mon roman : 7
Nombre de jours ou j’ai procrastiné : difficile à dire... 10?
Nombre de mots écrits: 2 624 (Résumé inclus)
Estimation d’avancement de mon premier draft : 10%
Perception d’avancement dans ma tête : 2%
État d’esprit : Occupé ailleurs

Et oui, ça fait déjà un mois depuis mon dernier Bilan d’écriture dans l’avancement de mon roman. Comme vous le voyez dans les chiffres du mois, le volume d’écriture est réduit par rapport au mois précédent, mais j’ai néanmoins nourri mon projet, par différents autres biais et je commence à visualiser la partie immergée de l’iceberg, que constitue l’écriture de roman. Voilà, à ce stade, comment je ressens les choses :

Ce que j’ai expérimenté ce mois-ci, c’est que le processus de création n’est pas linéaire, il ressemble plus à une spirale qui oscille sans cesse entre écriture et maturation. Soyons honnête, j’aurais clairement pu avancer plus sur mon premier Brouillon sans me sentir particulièrement bloquée. Procrastination ou re-priorisation de mon travail (choisissez pour moi, sur ce coup-là, je pense que je vais manquer d’objectivité!), j’ai décidé de consacrer moins de temps à l’écriture proprement dite et de profiter du calme de la période de confinement pour participer à une formation d’une semaine en Creative Writing.

Vous le savez, mon expérience en matière d’écriture est très intuitive et quand je me suis lancée dans l’écriture de roman, je me suis rapidement aperçue que cela n’était pas suffisant. Comme nous l’a très justement expliqué notre formateur :

« L’écriture de fiction, ce n’est pas de la magie, c’est de la prestidigitation »

Lionel Tran – Les Artisans de la Fiction

Le travail d’un écrivain, c’est de savoir créer une illusion pour le lecteur. Une illusion si bien ficelée qu’elle ressemble à s’y méprendre à une forme de réalité. Ceci concerne tous les genres de fiction, SF inclue, car il ne s’agit pas ici de réalisme, mais plutôt de vraisemblance. Et savoir créer ces illusions, et bien cela s’apprend, et nos amis anglo-saxons ont écrit des manuels entiers sur le sujet. Bien sûr, il y a les adeptes et les détracteurs, de ce type de techniques. Les puristes vous diront que ces approches amènent à la création d’histoires forcément stéréotypées. Les aficionados, dont je fais partie, apprécient énormément la structuration de pensée qu’apportent ces concepts, et ne se sentent pas pour autant contraints de suivre une recette toute faite. C’est comme en cuisine, apprendre que vous pouvez jouer sur les saveurs salées, sucrées, amères, sur les différentes textures, et même les couleurs, va vous donner la base nécessaire pour déployer votre créativité. Et pour ma part, c’est bien ce qu’il se passe. C’est déjà le troisième stage auquel je participe, sur des thématiques différentes, et je sors à chaque fois avec un fourmillement d’idées et surtout une bien meilleure conscience de la façon dont je construis mes histoires. Par ailleurs, comprendre ces techniques de Creative Writing, a radicalement changé mon regard dans ma façon de lire et ou de regarder les films et c’est encore plus savoureux !

À l’issue de ce stage, j’ai pu regarder mon histoire sous un nouvel angle et j’ai trouvé cet éclairage particulièrement aidant pour déceler ou se situaient par exemple les faiblesses de mon intrigue. Cela m’a notamment permis de me confirmer que la fin que j’avais prévue pour mon histoire manquait de force, car j’avais oublié de prendre en compte l’impact que je voulais que cette intrigue ait sur le personnage principal. Une bonne histoire permet forcément au Héros d’évoluer, dans un sens ou dans un autre. Il est très rare qu’un Héros reste exactement le même, entre le début d’une histoire et la fin. Cette évolution, c’est ce que le spectateur attend et/ou espère. Ensuite, à l’auteur de voir s’il veut satisfaire ou frustrer son lecteur ! 😉

En bilan, je dirais donc que le mois de Mai a été productif avec peu de production. Ahah, un nouveau concept ? Et bien, je crois que pour quelqu’un qui vient comme moi du milieu de l’entreprise, cet état de fait me surprendra toujours. Car la création demande autant de FAIRE que de VIVRE son déroulement. Créer une histoire, est finalement un processus organique et il faut lui laisser l’espace de respirer pour lui donner sa pleine puissance. Voilà pourquoi les écrivains se battent autant pour avoir de meilleures conditions de création. Il existe peu d’activités qui demandent autant de temps pour produire. Un auteur peut facilement mettre des années à écrire son roman, et il est rémunéré quelques euros par exemplaires vendus. Le calcul est rapide à faire : à part les prix littéraires, l’édition papier est difficilement rentable pour un écrivain qui veut vivre exclusivement de son art. Pour ma part, cela ne m’empêchera jamais d’écrire, car je sais que j’ai besoin de ce processus créatif dans ma vie pour nourrir mon activité de Facilitatrice Potentiel et pour nourrir mon âme, au-delà des retombées financières qu’il peut m’apporter. Il y a de nombreuses façon de s’imaginer écrivain, et je crois que la situation actuelle pousse le milieu de l’édition à se réinventer. Je serais ravie de pouvoir y participer, même si la forme n’est pas encore confirmée. En attendant, chaque moment passé face à mon Roman m’apprend bien au delà de ce que nombre de formations ont pu m’apporter au cours de ma carrière professionnelle. Vous le savez, pour moi, l’écriture est un outil de développement ultra puissant.

Pour finir, je vous avais promis, le mois dernier, de vous partager un petit résumé du roman sur lequel je suis en train de travailler. Vous aurez ainsi une idée un peu plus précise de ce dont je parle lorsque je vous raconte mes tribulations d’écrivaine. 🙂

PHŒNIX - Résumé
« Cela fait bientôt quinze ans, que Gabrielle s’applique dans son rôle d’épouse modèle, auprès de Stephen. Ils habitent Chicago, dans un magnifique Duplex. Leur fille, Cheyenne vient de rentrer au Collège, et l’entreprise familiale, héritée par son mari, génère suffisamment d’argent pour que Gabrielle n’ait pas besoin de travailler pour gagner sa vie. Cela fait aussi quinze ans, que Gabrielle et sa sœur ne se sont pas vues, pas parlé, pas écrit. Rien qui ne puisse raviver la douleur. Rien qui ne puisse rappeler ce matin de Novembre où leur relation s'était irrémédiablement brisée. Oublier. Jessica avait passé de nombreuses années à l’étranger, à poursuivre sa passion pour les médecines ancestrales. Elle semblait s’être donné pour mission, de rencontrer tous les Maîtres Yoda de la Planète. Cette sœur lui avait-elle manqué ? Pas tant que ça. La vie de Gabrielle était presque parfaite. S’il n’y avait pas ces angoisses nocturnes, si l'alcool n'était pas un sujet, si elle pouvait être la femme que Stephen lui demande d’être à ses cotés. Si, si, si… Mais plus Gabrielle fait d‘efforts, plus les choses dérapent, et plus elle perd le contrôle de la situation. Elle s’est promise de tout supporter, mais elle refuse que sa fille pâtisse de ses erreurs. Sur un coup de tête, elle quitte Chicago avec Cheyenne, pour se réfugier chez sa meilleure amie, à des milliers de kilomètres, dans un petit village du Nouveau-Mexique. Cet endroit, a été le refuge des deux sœurs, pendant toute leur enfance. C’est là, qu’elles vont se retrouver et devoir, malgré leurs résistances, affronter les fantômes du passé. Ces retrouvailles constituent elles un espoir de réconciliation, ou bien l’annonce d’un drame plus grand encore que celui qui les a séparé ? Il n’y a qu’un moyen de le savoir, et de toute façon, Gabrielle n’a plus vraiment le choix. »

Le mois prochain, je vous propose de vous présenter plus concrètement mes personnages.
En attendant, bon courage à tous les écrivains et écrivaines en herbe dans leur projet ! <3